IX – Le camp avancé – Fragment 2
Le cuir s’était rigidifié à l’impact et avait dissipé en partie l’énergie du projectile. Une chance pour lui, la balle avait frôlé la jambe sur l’extérieur de la cuisse, lui évitant la fracture. Celui ou celle qui venait de tirer ne devait rien savoir en matière de tir de précision à longue distance. Un tireur d’élite aurait identifié sa cible avant de faire feu et aurait visé le torse pour plus d’efficacité. Le résultat était le même, témoignant d’une indiscipline révoltante. Pas exactement le profil d’un légionnaire. Pas bon signe. Jurant une fois encore, Faure massa sa jambe pour retrouver de la mobilité et roula hors de la dune en levant prudemment les mains. Rien. Après une longue minute, il prit le monoculaire d’une main et observa ce qui se passait en face. Un soldat s’agitait à l’entrée du camp, en faisant de grands signes de main. Il était possible de l’interpréter comme une invitation à le rejoindre ou à foutre le camp au plus vite. Colère et curiosité aiguillonnaient maintenant son esprit. Tandis qu’il s’approchait, il réalisa son erreur. Une femme, mince, assez grande, aux cheveux rasés, portant les insignes de sous-lieutenant, sans doute malgache, si Faure devait se fier à la carnation de la peau et à la forme de ses yeux. Ses traits étaient émaciés et son regard tiré, indiquant une longue série d’épreuves dont elle n’était pas sortie indemne, mais elle se tenait encore droite, même si un courant d’air aurait suffi à la faire trébucher.
— Père Capitaine, fit-elle d’une voix éraillée sans le saluer. Etes-vous celui que j’attendais depuis si longtemps ?
S’attendant au pire, Faure la dépassa sans répondre et regarda tout autour de lui. L’endroit était parfaitement silencieux, et il n’y avait pas d’autres traces de présence humaine. Abasourdi, il finit par se retourner vers elle.
— Vous êtes seule, Lieutenant ?
— Elle cligna des yeux, comme épuisée.
— Cela fait maintenant six mois que nous sommes isolés du reste du monde. Et quatre mois que je suis livrée à moi-même.
Il regarda encore autour de lui, incrédule.
— Mais que s’est-il passé enfin ?
— Nous avons tous cherché des réponses. Je suis la dernière. J’espère qu’un prêtre pourra me prêter assistance. Mais, avant que vous ne vous en rendiez compte par vous même, je crois que nous sommes en présence du divin.
La lumière vacille. Le fragment suivant commence dans l’ombre.
Le Cercle des Illuminés
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